Voilà une question qui mérite qu’on s’y attarde un peu ! Posons tout d’abord un premier postulat : le travail de musculation revient en permanence à lutter contre la gravité puisqu’il s’agit en fait:
- D’arracher une charge à la gravité (en l’éloignant du sol)
- Puis de lutter pour qu’elle ne soit pas attirée trop vite vers le sol
- Ou de la laisser retomber (comme les haltérophiles).
Nombreux sont ceux qui se concentrent sur la phase d’effort (poussée ou tirage), et ne prêtent que peu d’attention à la phase antagoniste du mouvement de musculation (la descente ou la remontée de la charge), ne freinant qu’en toute fin du mouvement de musculation. Le fameux rebond de la barre sur la poitrine lors du développé couché en est une parfaite illustration. Pourtant, en y regardant de plus près, contrôler son mouvement du début à la fin pourrait se révéler bénéfique à plus d’un titre.
Intéressons-nous à la mécanique musculaire lors d’un mouvement de musculation. Pour que l’exemple soit plus parlant, nous illustrerons nos propos en choisissant l’exercice du curl haltère pour les biceps. Il existe trois types de régime de contractions :
- Le régime concentrique: les points d’insertion d’un muscle se rapprochent. Dans notre exemple, c’est le temps de la remontée de la charge
- Le régime isométrique (les points d’insertion du muscle sont immobiles). Dans notre cas, cela correspond au deux temps haut (bras fléchi) et bas (bras quasi tendu) du mouvement.
- Le régime excentrique: les points d’insertion du muscles s’éloignent l’un de de l’autre. Il s’agit donc du temps de descente de la charge, lorsque le bras se déplie. Retenir la charge sur le mouvement de musculation revient donc à solliciter plus encore le régime de contraction excentrique, et ce, quel que soit le mouvement (de poussée ou de tirage). Quels sont les bénéfices de ce travail ? Sur un plan énergétique, il est plus couteux.
- En effet, en contrôlant la charge lors de sa descente ou de sa remontée, la dépense calorique sera plus importante que si vous la laissez tomber (ce qui ne demande aucun effort). Cela parait évident, mais important à rappeler, surtout si votre objectif est de perdre de la masse grasse.
- Sur un plan sécuritaire, ce contrôle va vous permettre d’épargner vos articulations en ne les mettant pas en butée ou en hyper extension.
Je peux vous assurer que lorsqu’on manipule des charges relativement lourdes, c’est l’attention portée à ce type de détail qui délimite souvent la frontière entre le mouvement de musculation sûr et la blessure. De plus, ralentir la charge lors de sa phase excentrique va vous demander de mobiliser des charges moins lourdes, car vous allez « fatiguer » plus vite. Et moins la charge est lourde, moins il y a de risque de léser son articulation ou ses muscles. Ce qui va dans donc le sens d’une activité plus sécuritaire.
Sur le plan de l’hypertrophie, ce régime de contraction est particulièrement intéressant. En effet, retenir la charge los de la phase excentrique va provoquer plus de microlésions sur la fibre musculaire que le régime concentrique (courbatures garanties!). De fait, les adaptations à l’effort vont provoquer un mécanisme d’hypertrophie qui sera supérieur (concentrique + excentrique au lieu du concentrique seul).
Certaines études américaines se sont penchées sur la question. Pour l’une d’entre elle, 2 groupes ont travaillé durant 12 semaines, en concentrique uniquement pour le premier, en excentrique pour le second.
Il s’est avéré qu’à terme, ceux qui avaient suivi l’entrainement basé sur le régime de contraction excentrique avaient une augmentation du diamètre de leurs fibres musculaires 10 fois supérieure par rapport à ceux qui avaient travaillé exclusivement en concentrique.
A tel point que certains culturistes s’entrainent en faisant des mouvements négatifs. Par exemple, sur le développé couché, ils retiennent une charge allant jusqu’à 120% de leur 1RM, et se font aider de partenaires pour remonter la charge !
Résultats garantis, mais prudence : toujours avec un partenaire, une seule séance de ce type pour un groupe musculaire donné tous les 15 jours, et jamais d’étirements sur la fin d’une séance de ce type (car risque particulièrement important de lésions musculaires) !
Enfin, sur le plan de la force, le régime excentrique permet de mobiliser des charges bien plus lourdes que le régime concentrique (cf. exemple précédent). Certains haltérophiles ou pratiquants de powerlifting peuvent travailler ainsi avec des charges allant jusqu’à 140% de leur 1 RM ! Car oui, un muscle développe plus de force quand il est étiré que lorsqu’il se raccourcit
Alors, je ne sais pas pour vous les amis, mais en ce qui me concerne, je vais continuer à freiner ma charge ! Oserais-je vous suggérer de faire de même ?
Alice Pearson est une nutritionniste associée agréée par l'UKVRN et conseillère accréditée en matière de lutte contre le dopage, ayant obtenu un Bachelor’s of Science en nutrition et un Master’s of Science. Elle s'intéresse particulièrement à l'utilisation des suppléments sportifs pour améliorer la santé, la condition physique et la performance sportive.
Alice a de l'expérience de travail avec des athlètes amateurs et d'élite, notamment en fournissant un soutien nutritionnel au Tranmere Rovers FC et au Newcastle Falcons Rugby Club. Ses conseils en nutrition sont toujours appuyés par des recherches fondées sur des données probantes, qu'elle tient à jour grâce au perfectionnement professionnel continu et à son apprentissage autonome.
Dans ses temps libres, Alice aime voyager, faire du sport et se lire un bon livre.
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